Discussion avec Madame Fadila Laanan, secrétaire d'Etat à la Région de Bruxelles-Capitale
M. le président.- La parole est à M. du Bus de Warnaffe.
M. André du Bus.- Depuis des années, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, la politique pour l'intégration professionnelle des personnes handicapées s'est développée dans plusieurs directions :
- - mesures incitatives ;
- - mesures d'accompagnement et d'intervention en entreprise à travers les plans de diversité, axés notamment sur les personnes handicapées ;
- - obligations d'emploi dans le secteur public.
L'arrêté royal du 5 mars 2007, organisant le recrutement des personnes handicapées dans la fonction publique administrative fédérale, prévoit que les services publics doivent mettre au travail des personnes handicapées à concurrence de 3% de leur effectif.
Malgré une législation fédérale en faveur des personnes handicapées et mettant en place une obligation d'emploi des personnes handicapées par les entreprises privées ainsi que dans le secteur public, la Belgique accuse un certain retard au vu de la norme européenne.
L'objectif de cette question orale n'est pas uniquement de connaître le nombre de personnes handicapées dans la fonction publique, aussi important soit-il, mais de mettre également l'accent sur la nécessité de valoriser ce secteur.
Quel est le nombre de personnes engagées au sein de la fonction publique régionale bruxelloise qui sont en situation de handicap ?
Comment pourrions-nous faire en sorte de valoriser cette situation de handicap ?
Serait-il envisageable de créer une cellule pour informer davantage ces personnes sur leurs droits dans le secteur de la fonction publique ?
Y a-t-il vraiment, dans ces contrats, une valeur ajoutée proposée à ces personnes en situation de handicap ?
Si oui, ne faudrait-il pas revoir ces acquis afin de davantage valoriser la fonction publique ?
M. le président.- La parole est à Mme Laanan.
Mme Fadila Laanan, secrétaire d'État.- Le statut fixe le nombre de personnes handicapées que les administrations régionales sont tenues d'occuper à 2% au minimum de l'effectif prévu par le plan de personnel. Le handicap de ces personnes doit être reconnu par un organisme agréé.
Pour les organismes qui ne sont pas soumis au statut commun des agents de notre Région - comme Bruxelles-Propreté -, cette obligation n'est fixée dans aucun texte réglementaire.
Par contre, dans le cadre de l'élaboration des plans d'action de diversité, obligatoires en vertu de l'ordonnance du 4 septembre 2008 et de son arrêté d'exécution du 3 mars 2011, visant à promouvoir la diversité et à lutter contre les discriminations au sein des administrations régionales, des objectifs ont été fixés par le gouvernement en date du 12 mai 2011. Ils concernent notamment le recrutement et l'emploi des personnes ayant un handicap et tendent à favoriser leur accès au travail et adapter le poste de travail à leur handicap, si nécessaire.
En principe, tous les organismes régionaux ont dû intégrer des actions en lien avec ces objectifs dans leur plan d'action de diversité.
En décembre dernier, j'ai demandé aux managers de la diversité de me transmettre le nombre de personnes en situation de handicap connu et reconnu par leurs institutions. Les taux établis varient entre 0% et 1,5%, ce qui est assez décevant.
Pour estimer le nombre de personnes avec un handicap, il n'est tenu compte que du concept de handicap connu et reconnu. Dès lors, il n'est pas du tout exclu que le nombre de personnes handicapées soit plus élevé que l'on croit dans ces organismes. Beaucoup de personnes en situation de handicap ne veulent en effet pas être étiquetées comme telles et préfèrent donc ne pas apparaître dans les statistiques.
J'ai réuni, le 13 janvier 2015, le Comité bruxellois de la diversité. À cette occasion, les managers de la diversité ont exprimé leurs difficultés à atteindre l'objectif fixé de 2% malgré les actions mises en place. J'ai donc décidé de tenir prochainement une réunion sur le sujet.
Au sein du Service public régional de Bruxelles (SPRB), le taux d'occupation de personnes handicapées s'élève à 0,88%. L'inclusion de la personne handicapée y est pourtant valorisée depuis plusieurs années par la mise en place de divers leviers, tels que l'amélioration et l'intégration du collaborateur ayant un handicap, un formulaire de demande d'aménagements raisonnables pour les nouveaux collaborateurs, ou encore le développement de partenariats avec des organismes ou des associations spécialisés pour un accompagnement sur les lieux de travail.
Un coaching a été mis en place par la cellule de bien-être et de diversité, afin de permettre à la hiérarchie employant des personnes handicapées de vivre au mieux cette expérience et de bien les accueillir au sein de leurs services.
Il existe aussi une consultation prioritaire systématique de doubles listes de lauréats constituées par Selor.
L'administration collabore avec des asbl spécialisées dans l'insertion socioprofessionnelle des personnes handicapées, comme l'Agence wallonne pour l'intégration des personnes handicapées (Awiph), Personne handicapée autonomie recherchée(Phare) et le Vlaamse Dienst voor Arbeidsbemiddeling en Beroepsopleiding (VDAB).
Les canaux de diffusion d'offres d'emploi sont élargis grâce à la mise en place d'un partenariat avec la consultation sociale d'Actiris et l'asbl Wheelit.
Des contrats d'adaptation professionnelle sont proposés aux personnes en situation de handicap.
Au niveau du SPRB, une cellule dédiée au bien-être au travail et à la diversité porte ce projet au sein de la Direction des ressources humaines.
Les autres organismes régionaux sur lesquels j'exerce l'autorité directe, c'est-à-dire Innoviris et l'Agence Bruxelles-Propreté(ABP), mettent également en œuvre des actions en rapport avec cet objectif.
Pour ce qui concerne Innoviris, qui n'emploie que 33 agents, aucune personne atteinte d'un handicap connu et reconnu n'est employée, même si le plan de diversité de l'organisme prévoit la prise en compte de cette spécificité, notamment dans les procédures de sélection et l'aménagement adéquat des locaux.
Au niveau de l'ABP, ce type de renseignements n'était pas demandé aux agents et il n'existait pas de statistiques établies sur cette question. Depuis trois mois, l'agence a intégré cette question à l'engagement, en laissant le choix à la personne de fournir l'information. Jusqu'à présent, aucun candidat n'a répondu positivement à la question de la présence d'un handicap.
En 2015, deux actions vont être menées par la Cellule diversité : la première action vise à définir une méthode pour officialiser les personnes handicapées déjà employées par l'ABP, sans pour autant les stigmatiser. La seconde action vise la mise en place d'un partenariat avec un opérateur externe spécialisé dans la mise au travail de personnes handicapées, tant au niveau opérationnel - fonctions de balayage, par exemple - qu'au niveau des services administratifs.
Il faut admettre que les chiffres en la matière ne sont pas très bons. Nous comptons toutefois agir rapidement. Ainsi, les managers de la diversité ont été chargés d'établir un diagnostic, qui servira de base à la rédaction d'un plan opérationnel de soutien aux personnes qui présentent un handicap au sein de nos services publics bruxellois. Il est indispensable d'inclure l'ensemble de la diversité de nos citoyens dans la fonction publique.
Les chiffres peu encourageants dont nous disposons laissent à penser qu'il s'agira d'un travail de longue haleine. Dans quelques mois, j'espère pouvoir revenir vers vous avec des actions plus concrètes dans ce domaine, qui permettraient de rencontrer votre demande.
M. le président.- La parole est à M. du Bus de Warnaffe.
M. André du Bus de Warnaffe.- Je vous remercie pour vos réponses. Celles-ci donnent une image plutôt inquiétante de la situation, bien que le gouvernement régional ait fixé une norme à atteindre depuis plusieurs années. C'est à se demander si une prise de conscience a eu lieu quant à ses objectifs et aux moyens à développer pour les atteindre.
J'ai bien pris note des différentes initiatives, qui ne sont en cours que depuis très peu de temps. Leurs effets ne pourront donc se matérialiser que dans les mois ou les années à venir.
Un travail fondamental doit être accompli avec les associations en charge des personnes en situation de handicap. Je suis certain qu'il existe un déficit d'information de leur côté au sujet des possibilités d'emploi dans le secteur de la fonction publique. Je ne manquerai pas de vous interroger sur l'évolution éventuelle de la situation, à la fin de l'année, par exemple.
Vu le nombre de fonctionnaires que compte la fonction publique bruxelloise, l'engagement en son sein de personnes en situation de handicap pourrait représenter une vraie plus-value, contrairement à ce que vous avez expliqué la semaine dernière pour l'administration de la Commission communautaire commune où travaille une cinquantaine de personnes seulement, dont une répondant aux normes de la fonction publique bruxelloise.
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